Toi qui me vois malade, je vais te
faire une confidence. Il est vrai que la détresse m’a caressée,
que mon âme garde en cicatrices les morsures de la vie et que plus
ou moins tôt ou tard mes paupières resteront closes. Mais les déchirures de mon corps et
mes cris de la nuit ne représentent pas l’entièreté de mon
monde.
Si j’ai conscience d’avoir l’aspect
parfois d’un bourgeon négligé et souffrant, il faut que tu saches
que mon ombre est un oiseau coloré. La peine et la douleur n’ont
su obscurcir mes ailes. Trop souvent, tu restes enfermé, lassé et
brisé par un monde qui t’ennuie et qui n’est pas le tien. Aussi
régulièrement j’ouvre la fenêtre et m’envole vers un ailleurs
d’or et de lumière.
Sors de tes représentations, ne
projette pas sur moi ta vision de la vie. Les raisons pour lesquelles
tu me plains, sont à mon sens celles qui ont fait ma fortune. Le
malheur a fait qu’on m’a coupé les bras. Mais je me suis
fabriquée des ailes. La maladie m’a privée des condiments
terrestres qui te remplissent. J’ai acquis la légereté qui me
permet d’aller goûter aux douceurs célestes.
Janvier 2012